L’Urgence est toujours d’actualité en Egypte, où la situation des chrétiens et des autres se détériore

Giacomo Pizzi2 novembre 2012

photo by Miriam MezzeraNous rapportons ci-après les paroles préoccupées de Père Ibrahim Faltas, franciscain de la Custodie de Terre Sainte, de retour d’un voyage en sa terre natale : l’Egypte.

« Cette atmosphère riche de fascination et d’antiquité n’existe plus. J’ai été très déconcerté lors de mon récent voyage en Egypte, en constatant le changement radical de la situation et la rude réalité endurée par de nombreuses personnes. La vieille Egypte a disparu le 25 janvier 2011. Les télévisions du monde entier ont diffusé les images de la gigantesque foule d’Egyptiens sur la place Tahrir, qui protestaient jusqu’à faire s’effondrer définitivement le gouvernement et les services de police, accélérant ainsi le cours de l’histoire, comme dans toute l’Afrique du nord, d’ailleurs.

Pendant la révolution, de nombreux délinquants sont entrés dans les casernes de police, tuant de nombreux policiers. La police, qui aurait dû maintenir l’ordre public, a perdu sa dignité et son pouvoir. A l’heure qu’il est, elle n’existe plus, contribuant ainsi à faire dégénérer la situation dans les grandes villes comme Le Caire et Alexandrie, où règne le chaos, une véritable Babel !

Certains quartiers du Caire et d’Alexandrie sont devenus un grand marché à ciel ouvert : à chaque coin, le long des rues, sur les trottoirs, des femmes, des enfants, des hommes s’improvisent vendeurs de fruits et légumes ou d’autres marchandises, pour survivre à la pauvreté quotidienne, sans aucun respect des lieux, où la crasse s’accumule de jour en jour, intensifiant la précarité des conditions hygiéniques. Pendant la journée, les pannes d’ électricité surviennent au moins quatre fois, dans les logements résidentiels comme dans les commerces. C’est le soir, alors que Le Caire et Alexandrie sont aussi animées que de jour, qu’arrive la grande gêne, contraignant de nombreuses personnes à réduire leurs activités, car paralysées par le manque de lumière. Même l’eau courante ne coule pas toujours !

Je suis tombé sur des files d’attente de voitures et de camions, longues de plusieurs kilomètres, attendant des heures pour pouvoir prendre de l’essence. La circulation est ingérable, faute de contrôle de l’ordre et des règles du code de la route. (…) La criminalité se répand ainsi, et on assiste chaque jour à des altercations lors desquelles de jeunes délinquants vous arrêtent dans la rue d’un ton menaçant et vous dérobent. Ce sont de jeunes gens sur des mobylettes délabrées qui volent les sacs à main des dames, arrachent des mains les portables des passants, même si ces derniers sont en pleine conversation téléphonique. De nombreux délinquants ont occupé de façon abusive des appartements vides et les propriétaires légitimes ne peuvent ni intervenir, ni se tourner vers la police car personne ne les défend.

(…) J’ai longuement parlé avec de nombreux amis que j’ai eu l’occasion de rencontrer à Alexandrie, j’ai perçu leurs craintes pour le futur. Quelques directeurs d’école m’ont confirmé que de nombreux chrétiens ont émigré et que le nombre d’élèves a considérablement diminué. Beaucoup de gens ont perdu le sens du respect et de la civilisation, même concernant l’éducation de leurs propres enfants. L’immoralité se répand, tout autant que l’usage de stupéfiants parmi les jeunes.

(…) L’expérience que j’ai vécue cette année dans mon pays m’a énormément affligé ! Je n’ai plus reconnu ma ville d’Alexandrie, transformée en si peu de temps ! Mais ma grande amertume est de voir la disparition de la communauté chrétienne, qui ne voit aucune sortie de secours et aucun futur pour ses enfants et pour les nouvelles générations égyptiennes.

A l’aéroport, en attendant le vol qui me ramènera chez moi, je pense aux millions d’Egyptiens qui vivent cette dure réalité chaque jour et je ne peux m’empêcher de relire cette histoire du point de vue de mon expérience franciscaine. En 1219, pendant la période des croisades, Saint François a entrepris un long voyage à travers l’Egypte et la Syrie, en tant qu’ambassadeur de dialogue et de paix, pour rencontrer le Sultan d’Egypte. Ce geste de Saint François a été le témoignage du respect et du dialogue entre des cultures différentes.

(…) Peut-être qu’aujourd’hui, de cette terre où tant de culture a été déployée au cours des siècles, nous pourrons rouvrir l’esprit et le cœur de la nouvelle génération à un nouveau visage de l’Egypte, pour lequel le moment de se décider et de se relever est arrivé ; pour lequel la conquête la plus importante est de rendre à la société civile le respect et la dignité de chaque homme ; un nouveau visage fondé sur la loi et la citoyenneté, basé sur l’égalité, la justice et la garantie de liberté religieuse. »

Le récit complet (en italien) de Père Ibrahim Faltas se trouve sur le site de la Fondazione Giovanni Paolo II.

L’ATS pro Terra Sancta veut continuer à soutenir la population égyptienne, à l’aide des frères franciscains de la Custodie de Terre Sainte présents dans le pays. Pour cela, elle lance un appel afin que tous collaborent face à cette urgence.

Donnons de l’espérance à l’Egypte :

soutenons ceux qui sont dans la pauvreté, dans l’abandon, dans le désespoir !